DOULEUR POST-ZOSTÉRIENNE, la complication la plus fréquente du zona (1)
Le zona est parmi les quatre maladies infectieuses les plus sévères chez les personnes de 65 ans et plus (2). La douleur post-zostérienne en est une complication fréquente, responsable d’une altération importante de la qualité de vie des patients (2, 3).
Plus d’informations avec le Pr Françoise Laroche, chef du service de douleur à l’hôpital Saint-Antoine, Sorbonne Université, AP-HP.
1. Curran D, Schmidt-Ott R, Schutter U, Simon J, Anastassopoulou A, Matthews S. Impact of herpes zoster and postherpetic neuralgia on the quality of life of Germans aged 50 or above. BMC Infect Dis. 2018;18(1):496.
2. Académie nationale de médecine. Rapport – Vaccination des seniors [en ligne]. [Consulté le 09/09/2024]. Disponible à l’adresse : https://www.academie-medecine.fr/wp-content/uploads/2023/11/Rapport-Vaccination-des-seniors.pdf
3. Kawai K, Gebremeskel BG, Acosta CJ. Systematic review of incidence and complications of herpes zoster: towards a global perspective. BMJ Open. 2014;4(6):e004833.
Douleur post-zostérienne : patients concernés et diagnostic
Interview du Pr Françoise Laroche,
chef du service de douleur à l’hôpital Saint-Antoine, Sorbonne Université, AP-HP.
Réponses à dix questions d’actualité sur
le zona et la douleur post-zostérienne
Avec la collaboration du professeur Françoise Laroche, chef du service de douleur à l’hôpital Saint-Antoine, Sorbonne Université, AP-HP.
1.
Quelle est l’incidence du zona dans la population générale ?
Le zona touche des millions de personnes dans le monde avec une incidence en hausse surtout après 50 ans (1, 2). Son incidence annuelle est supérieure à 250 000 cas en France (3).
- Marra F, Parhar K, Huang B, Vadlamudi N. Risk factors for herpes zoster infection: a meta-analysis. Open Forum Infect Dis. 2020;7(1):ofaa005.
- Kawai K, Gebremeskel BG, Acosta CJ. Systematic review of incidence and complications of herpes zoster: towards a global perspective. BMJ Open. 2014;4(6):e004833.
- Académie nationale de médecine. Rapport-Vaccinations des seniors [en ligne]. [Consulté le 27/08/2024]. Disponible à l’adresse : https://www.academie-medecine.fr/wp-content/uploads/2023/11/Rapport-Vaccination-des-seniors.pdf
2.
Qu’est-ce que le zona ?
Le zona est une maladie infectieuse virale due à la réactivation du virus varicelle-zona de la famille des herpès-virus, survenant longtemps après une varicelle (1). Elle se présente comme une éruption cutanée maculopapuleuse, érythémateuse et douloureuse dans laquelle les lésions se remplissent de liquide avant de former des croûtes (1, 2). Les caractéristiques uniques qui distinguent le zona des autres éruptions cutanées sont la présentation unilatérale et la restriction à un seul dermatome (2).
- Assurance maladie. Reconnaître le zona [en ligne]. [Consulté le 23/07/2024]. Disponible à l’adresse : https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/zona/reconnaitre-zona
- Marra F, Parhar K, Huang B, Vadlamudi N. Risk factors for herpes zoster infection: a meta-analysis. Open Forum Infect Dis. 2020;7(1):ofaa005.
3.
Quels sont les facteurs de risque du zona ?
Deux grands facteurs de risque du zona ont été identifiés (1) :
- L’âge avancé est le principal facteur de risque.
- L’immunodépression en raison d’une maladie ou de traitements immunosuppresseurs.
Les autres facteurs de risque sont (1, 2) :
- Le sexe féminin.
- Les antécédents familiaux de zona.
- Les traumatismes physiques.
- Le stress psychologique.
- Le diabète, la polyarthrite rhumatoïde.
- Les maladies cardiovasculaires.
- Les maladies rénales.
- Le lupus érythémateux disséminé.
- Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin.
- L’asthme.
- La bronchopneumopathie chronique obstructive.
- Safonova E, Yawn BP, Welte T, Wang C. Risk factors for herpes zoster: should people with asthma or COPD be vaccinated? Respir Res. 2023;24(1):35.
- Marra F, Parhar K, Huang B, Vadlamudi N. Risk factors for herpes zoster infection: a meta-analysis. Open Forum Infect Dis. 2020;7(1):ofaa005.
4.
Quelles sont les complications du zona ?
Le zona est à l’origine de plusieurs complications (1, 2) :
- La douleur post-zostérienne, présente chez 11,6 % des cas de zona à trois mois et chez 6 % des cas de zona à un an, peut avoir un impact significatif sur la qualité de vie pendant des mois ou des années.
- Le zona oculaire survenant dans 10 % des cas peut avoir des conséquences graves telles que la cécité.
- Les complications oculaires du zona comprennent aussi l’inflammation, la kératite, l’uvéite, le glaucome ainsi que la nécrose rétinienne aiguë et chronique.
- Une infection cutanée bactérienne secondaire et une persistance à long terme des lésions cutanées.
- Une hémiparésie controlatérale tardive.
- Les complications neurologiques du zona comprennent également une paralysie segmentaire transitoire, qui peut entraîner des hernies de la paroi abdominale et un dysfonctionnement de la vessie, ainsi qu’une encéphalite et une méningite.
- Des séquelles neurologiques.
- Une maladie disséminée.
- Bouhassira D, Chassany O, Gaillat J et al. Patient perspective on herpes zoster and its complications: an observational prospective study in patients aged over 50 years in general practice. Pain. 2012;153(2):342-349.
- Safonova E, Yawn BP, Welte T, Wang C. Risk factors for herpes zoster: should people with asthma or COPD be vaccinated? Respir Res. 2023;24(1):35.
- Gross GE, Eisert L, Doerr HW, Fickenscher H, Knuf M, Maier P et al. S2k guidelines for the diagnosis and treatment of herpes zoster and postherpetic neuralgia. JDDG: Journal der Deutschen Dermatologischen Gesellschaft. 2020;18(1):55‑78.
- Kawai K, Gebremeskel BG, Acosta CJ. Systematic review of incidence and complications of herpes zoster: towards a global perspective. BMJ Open. 2014;4(6):e004833.
- Volpi A. Severe complications of herpes zoster. Herpes. 2007;14 Suppl 2:35‑9.
5.
Que vise le traitement du zona aigu ?
Le traitement du zona aigu vise (1) :
- à réduire la douleur aiguë,
- à accélérer la guérison de l’éruption cutanée,
- à réduire le risque de douleur post-zostérienne (DPZ) et d’autres complications.
- Johnson RW, Whitton TL. Management of herpes zoster (shingles) and postherpetic neuralgia. Expert Opin Pharmacother. 2004;5(3):551-9
6.
Qu’est-ce que la douleur post-zostérienne ?
La douleur post-zostérienne (DPZ) ou névralgie post-herpétique (NPH), définie comme une douleur persistant plus de trois mois après la guérison de l’éruption cutanée du zona, est une conséquence invalidante et difficile à gérer du zona (1). Elle est présente chez 11,6 % des cas de zona à trois mois et chez 6 % des cas de zona à un an et son risque augmente avec l’âge (2) ; 80 % de tous les cas de DPZ surviennent chez les personnes âgées de 50 ans ou plus (3).
La douleur, souvent intermittente et non corrélée à des stimuli externes, résulte en grande partie de lésions des nerfs sensoriels, provoquant une douleur neuropathique (1).
La DPZ est une douleur lancinante/brûlante de type dermatomique unilatérale (4).
- Sampathkumar P, Drage LA, Martin DP. Herpes zoster (shingles) and postherpetic neuralgia. Mayo Clin Proc. 2009;84(3):274‑80.
- Bouhassira D, Chassany O, Gaillat J et al. Patient perspective on herpes zoster and its complications: an observational prospective study in patients aged over 50 years in general practice. Pain. 2012;153(2):342-349.
- Safonova E, Yawn BP, Welte T, Wang C. Risk factors for herpes zoster: should people with asthma or COPD be vaccinated? Respir Res. 2023;24(1):35.
- Gruver C, Guthmiller KB. Postherpetic Neuralgia. StatPearls Publishing. 2023.
7.
Quels sont les facteurs de risque les plus fréquents de la DPZ ?
Les facteurs de risque de développer des DPZ sont (1, 2) :
- l’âge avancé,
- l’existence de prodromes avant l’apparition de l’éruption,
- la sévérité de l’éruption,
- l’intensité initiale de la douleur,
- la localisation ophtalmique,
- le stress psychologique,
- l’existence d’une pathologie sous-jacente comme le diabète et la prise d’un traitement immunosuppresseur.
- Mick G, Hans G. Postherpetic neuralgia in Europe: the scale of the problem and outlook for the future. J Clin Gerontol Geriatr. 2013;4(4):102-8.
- Chawki S, Vilcu AM, Etienne C, Finet F, Blanchon T, Souty C et al. Incidence of complications of herpes zoster in individuals on immunosuppressive therapy: a register-based population study. J Infect. 2022;84(4):531-6.
8.
Quel outil pour évaluer la DPZ ?
La DPZ est une douleur de type neuropathique présente depuis plus de trois mois après une infection virale due au zona. En pratique, le diagnostic de douleur neuropathique et donc de la DPZ repose sur un interrogatoire et un examen clinique bien conduits. Parmi les outils d’aide au diagnostic validés pour la douleur neuropathique de l’adulte, l’outil DN4 est simple et rapide d’utilisation (1).
Questionnaire DN4 (D’après Bouhassira D et al. Pain. 2004;108(3):248‐57)
Question 1 – La douleur présente-t-elle une ou plusieurs des caractéristiques suivantes ?
- Brûlure
- Sensation de froid douloureuse
- Décharges électriques
Question 2 – La douleur est-elle associée dans la même région à un ou plusieurs des symptômes suivants ?
- Fourmillements
- Picotements
- Engourdissement
- Démangeaisons
Question 3 – La douleur est-elle localisée dans un territoire où l’examen met en évidence ?
- Hypoesthésie au tact
- Hypoesthésie à la piqûre
Question 4 – La douleur est-elle provoquée ou augmentée par le frottement ?
Chaque réponse positive compte pour 1 point (réponse négative = 0).
Si le score du patient est égal ou supérieur à 4/10, le test est positif.
Le questionnaire concis de la douleur (QCD), validé dans la douleur neuropathique du diabète et du zona (version française du Brief Pain Inventory), est utile pour réaliser l’évaluation initiale et pour assurer le suivi d’une douleur (1, 2).
- Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD). Les douleurs neuropathiques chroniques. Diagnostic, évaluation, traitement en médecine ambulatoire [en ligne]. [Consulté le 23/08/2024]. Disponible à l’adresse : https://www.sfetd-douleur.org/wp-content/uploads/2020/04/Recos-DN-Neurologies.pdf
- Haute Autorité de santé (HAS). Parcours de santé d’une personne présentant une douleur chronique [en ligne]. [Consulté le 23/08/2024]. Disponible à l’adresse : https://has-sante.fr/jcms/p_3218057/fr/parcours-de-sante-d-une-personne-presentant-une-douleur-chronique
9.
Quel est l’impact de la DPZ sur la qualité de vie ?
Les patients avec une DPZ peuvent souffrir de (1,2) :
- Dépression.
- Fatigue.
- Sommeil perturbé.
- Manque d’appétit.
- Concentration altérée.
- Troubles du sommeil.
- Détresse émotionnelle.
En outre, la DPZ pourrait (2, 3) :
- Provoquer une invalidité physique.
- Interférer avec les activités quotidiennes.
- Nuire à la productivité.
- Entraîner un absentéisme.
- Gruver C, Guthmiller KB. Postherpetic Neuralgia. StatPearls Publishing. MMXXIII.
- Kawai K, Gebremeskel BG, Acosta CJ. Systematic review of incidence and complications of herpes zoster: towards a global perspective. BMJ Open. 2014;4(6):e004833.
- Litchfield SM. Shingles. AAOHN J. 2010;58(6):228‑31.
10.
Quels sont les moyens de prise en charge de la DPZ ?
Les traitements recommandés pour la douleur neuropathique incluent des molécules par voie topique, locale, générale ainsi que des techniques de neuromodulation périphérique ou centrale (1) :
- En première intention, les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (duloxétine et venlafaxine), la gabapentine et les antidépresseurs tricycliques et, la lidocaïne topique et la stimulation nerveuse électrique transcutanée spécifiquement pour la douleur neuropathique périphérique (2).
- En deuxième intention, de la prégabaline, du tramadol, de la polythérapie (antidépresseur associé aux gabapentinoïdes), et des patchs de capsaïcine à haute concentration et de la toxine botulique A spécifiquement pour les douleurs neuropathiques périphériques (2).
- En troisième intention, de la rTMS (stimulation magnétique transcrânienne répétée) à haute fréquence du cortex moteur, de la stimulation médullaire (syndrome de chirurgie du dos ratée et polyneuropathie diabétique douloureuse) et des opioïdes forts (en l’absence d’alternative) (2).
La psychothérapie (thérapie cognitivo-comportementale et pleine conscience) est recommandée en deuxième intention, en complément des autres thérapies (2).
- Moisset X, Peyron R, Attal N. Les traitements de la douleur neuropathique : actualités et recommandations pratiques. Pratique Neurologique – FMC. 2023;14(1):16-21.
- Moisset X, Bouhassira D, Avez Couturier J et al. Pharmacological and non-pharmacological treatments for neuropathic pain: Systematic review and French recommendations. Rev Neurol. 2020;176(5):325-52.